Mamadou Saidou Bah ex-directeur général adjoint de la société minière Bel Air Mining S.A se dit menacé, séquestré et suivi dans la circulation par des personnes inconnues. M. Bah dit être victime d’un licenciement illégalement, pour cause, il dit avoir dénoncé des pratiques peu orthodoxe en matière de respect des droits de l’homme et des cas de corruption avérés au sein de l’entreprise Bel Air Mining S.A. Il l’a fait sur les ondes de FIM FM dans l’émission Mirador du mercredi 18 octobre 2023. Ci-dessous, l’intégralité de cette interview du désormais ex-directeur général adjoint de Bel Air Mining S.A.
Est-ce que vous confirmez votre état de stress permanent d’être menacé et poursuivi dans la circulation, est-ce que vous avez été illégalement licencié ?
J’ai fait l’objet de deux attaques, la première à main armée le 09 septembre 2023 à 11h45 tout près de chez moi. Les vidéos des caméras de surveillance des voisins peuvent le confirmer. J’ai été attaqué par trois motards cagoulés qui me suivait depuis le matin. La deuxième attaque quasiment dans les mêmes circonstances. J’ai porté plainte et la situation est dans les mains de la justice. Je vie une situation de persécution moralement. Ma famille et moi nous ne vivons pas parfois à domicile. Nous sommes obligés de partir chez les voisins, les amis ou dans la grande famille.
Qui vous en veut tant et pourquoi quelqu’un pouvait vous en vouloir ?
Je suis guinéen et toute ma vie, j’ai vécu en Guinée et je n’ai jamais fait l’objet d’une quelconque attaque. Je ne peux l’affirmer d’emblée mais les faisceaux d’indices me font croire que c’est la situation actuelle dans laquelle je vis et la façon avec laquelle je me suis séparé avec mon entreprise. C’est ce qui me met dans la situation actuelle. Je suis un jeunes guinéen, j’ai décidé de servir mon pays, c’est pour cela que je suis là.
Pour venir à ma séparation avec mon entreprise. C’est vrai, depuis cet incident de navire qui a conduit à mon départ précipité de l’entreprise, je vis persécuté, séquestré. Tout ce qui me reste c’est de m’exiler et je ne le ferai pas. Rien ne va m’obliger à m’exiler de mon pays parce que quelqu’un a ses intérêts menacés et puis il veut que je parte.
J’ai envie de paraphraser un peu le discours du Président de la transition à la tribune des Nations-Unies quand il dit ‘’les mêmes qui viennent nous donner les leçons de corruption, d’éthique, de bonne gouvernance, sont les mêmes qui viennent spolier nos ressources les yeux dans les yeux parfois en complicité avec nous-mêmes, avec nos cadres. » La situation de fraude que Monsieur Diallo (ndlr) parlait tout à l’heure, existe et je peux vous assurer que c’est moi qui l’ai dénoncée. J’ai fait des lettres de dénonciation formelle délivrée par voie d’huissier aux différentes autorités. Ce n’est pas caché, c’est moi qui l’ai fait de manière transparente.
Le peuple guinéen a eu des préjudices. On n’aurait construit plusieurs écoles et centre de santé avec cet argent-là. J’ai fait mes études postes universitaires en Angleterre spécialisé en droit et politique minière : les chefs de l’Etat doivent être payés. Les revenus des sociétés minières sont des dûs mais s’il y a des fraudes qui font que nous nous appauvrissons. On va continuer à être le château d’eau de l’Afrique de l’ouest, le scandale géologique on ne sortira pas de l’ornière. Cette situation est de notre responsabilité à tous de la protéger. La Guinée devient un pays normal et cela voudrait dire que nous prenions conscience de notre situation, qu’on fasse notre travail de façon professionnelle, qu’on ne gagne pas dans la fraude au détriment de notre pays.
On vous considère comme traitre au sein de l’entreprise, comme celui qui serait à l’origine des ennuis que traverse l’entreprise ?
Le mot traitre ne me dérange pas. Je ne sais d’où viennent les ennuis mais en tout cas les dénonciations viennent de moi. Sachez que moi et les autres travailleurs de l’entreprise vivons dans une psychose généralisée. Il est interdit de prononcer le nom de Monsieur Bah au sein de l’entreprise Bel air mining aujourd’hui. Les collègues de travail avec lesquels j’ai fait 7 à 8 ans de collaboration ne peuvent prononcer mon nom aujourd’hui dans l’entreprise au risque de se faire licencier. Si je suis traitre, je l’assume. Je suis fier de ça parce que je défends la légalité. Je défends les revenus de l’Etat guinéen.
J’étais confortable, extrêmement bien traité. Je pouvais continuer à prendre mon salaire, la fermer et continuer ma vie mais j’ai choisi de ne pas le faire. Il faudrait bien que la Guinée puisse se comporter comme l’Angleterre, la France où les choses sont normalisées. Il faudrait qu’on puisse sortir la tête de l’eau. On a beau ficelé les bonnes politiques, les meilleures législations au monde, si elles ne sont pas appliquées, si on se voit spoliés on ne sortira jamais de cette situation. Je profite de l’occasion pour appeler au sursaut national, à la conscience des uns et des autres. Faisons notre travail, défendons l’intérêt des opérateurs économiques mais dans le droit chemin. Si non on va exploiter nos mines pendant 10 ou 15 voire 50 ans, on va continuer à être pauvre. Les enfants vont grandir, on les dira que la Guinée est pauvre alors que j’en ai une responsabilité. J’ai choisi de ne pas le faire. Je suis fier d’être traitre au bénéfice de la Guinée.
Qui vous en veut tant au sein de cette entreprise, est-ce que vous n’allez pas saisir l’inspection générale du travail puis que vous dites que vous êtes persécuté ?
Conformément aux dispositions légales applicable dans notre pays, j’ai saisi les autorités judiciaires à cet effet et les processus sont en cours. Je crois à la justice, je crois aux dispositifs légaux et règlementaires de notre justice. Cela va suivre son processus normal et la vérité sera dite sans aucun doute.
Je tiens à préciser que depuis juillet où mon départ a été précipité de l’entreprise même mon certificat de travail qui doit découler des droits de mon licenciement n’est pas donné. Mon solde de tout compte qui est le cumule des congés que j’ai travaillé n’est pas payé. Mon salaire de juillet est bloqué. On veut me persécuter physiquement, moralement mais aussi on veut m’affamer pour que je la ferme mais je ne la fermerai pas.
Je reste déterminé à aller jusqu’au bout et je n’ai aucun doute que les autorités de ce pays feront de sorte que les intérêts de la Guinée soient protégés mais aussi les intérêts de ces sociétés soient protégés parce qu’elles investissent énormément de fonds dans notre pays.
Par contre on doit suivre les textes règlementaires en vigueur en République de Guinée si on veut évoluer.
J’ai envie de finir avec cette note la Guinée est en train de se normaliser, nous qui sommes de la jeune prenons nos responsabilités et que l’on fasse notre travail correctement. Qu’on ait ce sursaut national pour ne pas être complice de la spoliation des ressources de notre pays et de nos revenus.