‘’Tout près n’est jamais loin’’ dit-on souvent. Ce qui se passe sur les Iles de Saloum plus précisément à Dinouar au Sénégal est très grave, à en croire le coordinateur de l’association pour le développement de Dinouar Moussa N’diaye. L’ensablement de la brèche ouverte en 1987 par suite d’une coule qui a frappé l’Afrique de l’Ouest, provoque aujourd’hui le manque d’oxygène et les difficultés de reproduction de certaines espèces aquatiques. Rencontré en Côte d’Ivoire à l’occasion d’un atelier régional sur le rôle des médias dans la préservation de l’environnement en Afrique de l’Ouest, Moussa N’diaye a étalé les difficultés que vivent les populations de ces iles et les démarches en cours pour atténuer l’ensablement des côtes boueuses et la salinisation de l’eau qui arrose les rhizophores. Espérant que cette expérience puisse servir d’autres communautés qui vivent les mêmes réalités, la rédaction de votre quotidien www.guineeline.net a donné la parole à cet acteurs communautaires pour parler de leur vécu. Parler de cette réalité, peut être également un moyen pour interpeller les décideurs et d’autres acteurs influents à agir pour la préservation de l’environnement.
Les populations des îles de Saloum sur les côtes Sénégalaises ont commencé à vivre déjà les effets du changement climatique dans leur quotidien àtravers l’ensablement. Mais qu’est-ce qui est à l’origine de cet ensablement des côtes des îles Saloum ? Monsieur N’diaye Moussa répond par ce rappel ‘’En 1987, dans le cadre des grandes coules qui ont frappé les cotes de l’Afrique de l’ouest, une grande brèche s’est ouverte entre le village de Djiffer et la pointe de Saint Omar. Alors cette brèche a conduit à un ensablement de la mangrove. Ce qui a complètement détruit cette végétation. Parce que le type de mangrove qui est là-bas s’appelle le rhizophora qui est une espèce végétale qui peuple l’ensemble des iles de Saloum et qui ne répond pas dans un endroit sablonneux. Il y a une forêt de mangrove dans les iles de Saloum mais qu’on est en train de perdre parce qu’elle ne vivre que dans la boue. Dès qu’il y a un ensablement le rhizophora meurt parce qu’elle ne peut vivre dans la boue. C’est cette plante qu’on appelle par endroit le palétuvier. Cette brèche a fait qu’aujourd’hui les voix d’accès sur l’iles de Dinouar sont bouchées parce qu’elle a condit un cordon de sable qui est en face du village qui fait que les pirogues ne peuvent plus entrer dans le village.’’ Dans le souci d’atténuer l’avancée exponentielle de ce phénomène de dégradation de l’environnement, les populations de la localité de Dinouar ont mis en place une association qui a découlé d’un forum ‘’Cette association conduit le projet Reduction de la Vulnérabilité et Amélioration de la Résilience (REVAR) des populations des Iles de Saloum avec un focus à Dinouar. Je suis le coordinateur de ce projet. Je voudrais simplement dire que les populations de Dinouar souhaitent qu’on porte leur voix pour indiquer jusqu’où, elles sont fragilisées par les changements climatiques.’’ S’inquiète Monsieur N’diaye.
Cette perte de rhizophora cause d’autre perte parce que c’est elle qui filtre la salinité de l’eau de mer. La salinité de l’eau mer a conduit à un manque d’oxygène et beaucoup d’espèces ne peuvent plus survivre. Le rhizophora constitut un site d’incubation pour d’autres espèces de poissons. Ces espèces ont aujourd’hui disparu parce que qu’elles n’ont plus d’abri pour se reproduire. Nous a fait savoir Moussa N’diaye. Une réalité qui fait qu’aujourd’hui dans les îles de Saloum notamment à Dinouar, il y a une forte réduction des capacités économiques du fait que leurs produits de base qui sont les poissons et les huitres ont presque disparus. « Le poisson qu’on pouvait pêcher à une dizaine de mètres, aujourd’hui il faut faire une vingtaine de kilomètre pour le trouver. Cela constitut donc un problème majeur au niveau des capacités économiques des populations. »
En plus de la disparition de certaines espèces animales et végétales, Dinouar voit aussi ses fils et filles partir pour des voyages sans retour <<immigration clandestine>> « La principale menace qui est corolaire à la perte des ressources c’est qu’il y a une migration terrible. Les jeunes quittent leurs parents et vont ailleurs à la recherche de moyens de subsistance notamment ceux qui quittent les îles pour aller vers l’Espagne en empruntant des barques de fortune pour traverser l’océan avec tout ce que ça représente comme danger. Nous avons connu parmi nos enfants, nos neveux… des gens qui sont restés en mer. Voilà des choses qui sont aussi dues aux changements climatiques. »
Interrogé sur les propositions de solution, le coordinateur de la REVAR affirme qu’ils sont à la recherche ‘’Nous sommes toujours à la recherche de solution, c’est dans ce cadre que nous avons créé cette association parce que les populations avaient convoqué un grand forum pour évoquer l’ensemble des problèmes qu’elles vivent. Au terme de ce forum, les conclusions demandaient à ce qu’on mette en place un cadre pour porter ces conclusions-là. C’est ce cadre qui s’appelle l’Association pour le Développement de Dinouar. Dès que l’association a été mise en place, elle a produit un plan d’action et une banque de projet. C’est cette banque de projet qui a fait que le fonds d’adaptation au changement climatiques a lancé un appel de financement et nous avons été retenu pour bénéficier de ce financement. C’est lui qui nous a permis de construire des digues et de faire des actions de reboisement de la mangrove mais aussi des espèces fruitières et sauvages. Le fonds nous a aussi permis de mettre en place une agence météorologique pour faciliter le déplacement des pêcheurs en haute mer. ‘’
Le projet qui justifie la présence du coordinateur de l’association pour le développement de Dinouar à Abidjan est une source d’espoir pour la communauté ‘’Nous souhaitons que le nouveau projet là nous aide dans la recherche des solutions à partir du moment où nous avons la communication dans sa phase dénommée journalisme de solution. Nous souhaitons que les acquis de cette communication puissent être appliqués chez nous pour qu’on puisse trouver une solution à ce problème qui est un phénomène très grave’’ espère-t-il.
Visiblement désemparé, le coordinateur de la REVAR Monsieur N’diaye lance fait cet appel ‘’Appeler les autorités et les bailleurs de fonds à penser aux iles de Saloum particulièrement à Dinouar qui est beaucoup plus fragilisée que toutes les autres îles. Parce que justement, c’est Dinouar qui fait face à la brèche qui est intervenue entre Dinouar et Djiffer en 1987. C’est une véritable catastrophe écologique que nous sommes en train de vivre et les populations sont très inquiètes. Nous souhaitons que l’Etat nous regarde d’avantage et que les bailleurs de fonds aussi puissent être attirés par cette situation.’’
Les communautés de Dinouar tout comme beaucoup d’autres habitants des zones côtières sont aujourd’hui dans une impasse indescriptible face à la montée des eaux et des phénomènes de réchauffement climatique.
Boèboè Béavogui