C’est un homme plein d’assurance, qui se tient à la barre, en uniforme. Celui que l’on surnomme la « boîte noire » du régime Compaoré a choisi de témoigner debout. Le général se permet quelques traits d’humour. Il endosse même la robe de l’avocat, en lisant lui-même des pièces du dossier. Gilbert Diendéré a livré sa version des faits du 15 octobre 1987.
À 9 heures, dit-il, il convoque une réunion des différents responsables de la Sécurité nationale au Conseil de l’entente. Pourtant invité en tant que chef de la sécurité particulière de Blaise Compaoré, Hycinthe Kafando est absent. En début d’après-midi, Gilbert Diendéré va faire du sport sur le terrain de l’ENAM, à l’extérieur du Conseil de l’entente. Il entend des coups de feu, retourne au Conseil, et se rend vers le secrétariat où Thomas Sankara et ses collaborateurs sont déjà morts.
Gilbert Diendéré demande alors des comptes à l’un des membres du commando qui lui explique avoir pris l’initiative d’arrêter Thomas Sankara pour protéger Blaise Compaoré. Quand Gilbert Diendéré lui demande si Blaise Compaoré est au courant, l’homme lui répond : « Je m’en fous ! »
L’enjeu de cette audition, c’est de faire la lumière sur le niveau de responsabilité de Gilbert Diendéré. À l’époque, il était donc chef de corps adjoint du CNEC, le Centre de formation commando, dont étaient issus les soldats qui ont mené l’attaque. Le général était aussi à la division information du Haut Commandement des forces armées populaires. Il était donc responsable de la sécurité du Conseil de l’entente et d’autres sites sensibles.
La chambre et le parquet se sont donc étonnés que Gilbet Diendéré n’ait pas vu venir cette attaque, que certains de ces éléments aient pu échapper ainsi à son contrôle et qu’il n’ait pris aucune disposition le jour même pour sécuriser le Conseil ou arrêter les responsables des assassinats. « J’étais seul, désarmé, je ne savais pas qui était avec qui. Si j’avais fait un seul faux pas, je serais devenu la quatorzième victime », s’est-il défendu.
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